Pourquoi j’ai pleuré …

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Quelques années après mon retour d’un long séjour hors du Sénégal, en 2019 j’ai recommandé instamment à un ami d’enfance Youssou Touré (qui me demandait alors conseil) de rejoindre Macky Sall. D’abord parce qu’il était porteur d’un projet novateur. Ensuite, il était sur la trajectoire du triomphe. A l’époque, la Première dame était très liante et multipliait ses appels téléphoniques envers le sémillant syndicaliste, très fort en gueule à ce moment-là. Dès qu’il eut rejoint l’APR, l’actuel Président de la République l’imposa comme Coordonnateur du Réseau des Enseignants APR. Les Universitaires et autres Bac + 25 se sont mis à rouspéter, arguant que Youssou n’était ni diplômé comme eux, ni bien expérimenté en politique. Macky leur a répondu en ces termes : « J’ai été Ministre de l’intérieur, Premier Ministre et Président de l’Assemblée Nationale. » Comme quoi, il maitrisait les tenants et les aboutissants de la chose.  A l’époque l’OIS avait pignon sur rue et Youssou faisait le buzz chez les instituteurs (le plus important corps de la fonction publique sénégalaise) et au niveau de la population en quête de tribun de la plèbe.

Aussitôt embarqué dans l’aventure, mon ami me proposa de l’accompagner comme je le faisais déjà dans le cadre du syndicat qu’il dirigeait : l’OIS.  Je m’occupais surtout des textes. J’ai notamment participé à l’élaboration du projet éducatif en son volet ‘’Enseignement privé’’. En 2012, nous avons mis en œuvre le plan Kocc conçu par Khassime Wone, une plateforme extraordinaire qui a permis de sécuriser les élections grâce au travail mené sur le terrain par les éléments du Réseau des enseignants. Nous nous sommes déployés sur toute l’étendue du territoire national pour sensibiliser les militants et former les mandataires, scrutateurs et autres acteurs dns les opérations électorales. Le suivi de la transparence dans les bureaux de vote était assuré. Ensemble, nos représentants communiquaient au centre des opérations en temps réel, par simples sms, les résultats bureau de vote par bureau de vote. L’application compilait de façon fiable, les résultats suivant la carte électorale. Au soir du scrutin, Serigne Mbacké Ndiaye, voulut prendre les devants en annonçant la victoire du candidat Abdoulaye Wade.  Macky protesta vivement, sûr de lui, car il avait tous les résultats et savait avec quel pourcentage, il venait de gagner. En 2016, j’ai pris mes distances de Youssou et du parti. Le bateau voguait vers de mauvais rivages.

Depuis lors, je ne mène aucune activité politique partisane. Mais ce que j’ai appris avec Cheikh Anta Diop ne m’a jamais quitté et ne me quittera jamais. Face aux enjeux de l’heure au Sénégal et partout en Afrique, je ne saurais faire le veule ou l’aveugle-sourd-muet, pour ne penser égoïstement qu’à mes intérêts personnels. Du coup, j’écris (Peh de Géo – Mbegaan Koddu) et j’édite.

Je répète donc, que pour l’heure, je ne suis membre d’aucun parti politique. Mais alors, qu’est-ce qui m’a fait pleurer ? Suivez.

  • Un jour j’ai vu Ousmane Sonko extrait de sa voiture dont on venait de casser les vitres avec une violence inouïe, emmené sans ménagement avec une brutalité inhumaine, pour une raison obscure, dans un véhicule peu sécure pour lui. J’ai écrasé discrètement une larme avant d’en verser chaudement d’autres, sans pouvoir me retenir, moi le sexagénaire.
  • Avant-hier, après avoir lu sa publication sur Facebook annonçant une grève de la faim de sa part, j’ai fondu en larmes, non par pitié pour ce qu’il va endurer (c’est un guerrier) mais pour le sentiment de désespoir qui l’affectait au moment de la rédaction du post.
  • Hier, quand j’ai aperçu des hommes, monter sur des échelles, déployer une incommensurable énergie pour arracher la photo du leader de PASTEF des murs de son siège, j’ai encore pleuré, cette fois, comme un enfant. Ici, ce qui fait surtout mal, c’est la volonté de supprimer l’image du personnage de la mémoire des vivants. Quel dessein ! Puis, j’ai séché mes larmes en me disant que l’entreprise sera vaine, car, selon un dicton chinois, « J’entends, j’oublie, je vois je retiens » La mémoire visuelle des Sénégalais et des autres Africains a déjà calé cette représentation dans l’album des grands hommes. On peut ôter l’image de tous les murs du Sénégal, on ne l’effacera jamais dans l’esprit de ceux qui l’admirent.

Qu’est-ce qu’ils font ? Jusqu’où iront-ils ? 

 Je souhaite que mes larmes les arrêtent encore qu’il est temps. Et puisqu’on peut tout interdire sauf de pleurer, je verserai sur le chemin du destin macabre, un torrent qui noiera l’entreprise d’anéantissement du projet auquel croient énormément de gens. Qui veut m’interdire de pleurer n’a qu’à me priver de larmes.

De grâce, ceux qui peuvent joindre le précieux prisonnier, lisez-lui ces quelques extraits du poème de Rudyard de Kipling, pour rappel :

« Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie

Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,

Ou perdre d’un seul coup le gain de cent parties

Sans un geste et sans un soupir …

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite

Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,

 Si tu peux conserver ton courage et ta tête

Quand tous les autres les perdront,

Si tu peux supporter d’entendre tes paroles

Travesties par des gueux pour exciter des sots,

Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles   

sans mentir toi-même d’un seul mot …        

Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire

Seront à tout jamais tes esclaves soumis … »

Et puis, « Si vous vous retrouvez au fond d’un puits, gardez espoir, un puisard vous en sortira. » Proverbe wolof. En dit long l’histoire du prophète Yusuf jeté dans un puits par ses propres frères et repêché par hasard par des caravaniers. En plus le Coran que Monsieur Sonko maitrise tant nous dit :

3/54   … ومكروا ومكر الله والله خير الماكرين

Pourvu que ma plume ne trahisse pas mes convictions. Ma conscience est sauve. Je dormirai du sommeil des justes. A bon entendeur, advienne que pourra. Allah est KARIIM.

PS : Actualisation de mes articles précédents :

  1. Cheikh Bara Ndiaye dont la libération conditionnelle avait été déclarée actée est encore en détention du fait, dit-on, de l’opposition du parquet.
  2. Les soutiens du Niger se multiplient. Après le Mali et le Burkina Faso, la Guinée (Conakry), la Mauritanie et l’Algérie seraient prêtes à en découdre avec toute force qui s’en prendrait au Niger

Mbegaan Koddu

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