On peut écrire un livre pour se trouver un exutoire qui nous soulage de nos peines intimes, tel Hugo allant se pencher sur la tombe de sa fille arrachée tôt à son affection. On peut écrire pour crier son bonheur, comme Lamartine demandant au temps de suspendre son vol. On peut écrire pour refaire le monde, tirant de ses maux les plus atroces, les fleurs les plus exquises et les plus odorantes suivant Baudelaire. On peut écrire pour étaler la souffrance humaine dans un monde désespérément injuste à la Zola. On peut écrire pour danser du cœur, au rythme endiablé d’un tam-tam sourd, tel Senghor demandant que Kora et Balafon l’accompagnent. On peut écrire pour écouter les murmures du vent qui fouette les vagues d’un océan tumultueux. Ainsi a fait Birago Diop. On peut écrire pour s’indigner. Voilà David Diop jetant à la face du monde : « Dimbokro Poulo Condor … La ronde des hyènes autour des cimetières… »
Mais aussi on peut écrire pour partager, généreusement un récit qui nous donne des leçons de vie. C’est ici que je mets l’ouvrage « Parcours sonnant et trébuchant » de Balla Mboup. (Sous-titre : ENTRE NOSTALGIE ET AMERTUME).
Question légitime : « Comment, à quarante ans seulement, peut-on faire le récit de sa vie ? » Justement. L’auteur Balla Mboup n’en est pas à ses mémoires. Mais il a vécu une tranche de vie tellement dense que les mots pour la décrire bousculaient son être. Quel écrivain n’a pas vécu ce moment de transe pendant lequel on semble voir Prométhée tirer le feu sacré de l’Olympe pour nous le confier ? Quel créateur d’une œuvre d’art quelconque n’a pas vécu ce moment exceptionnel d’extase, quand vient la divine inspiration ?
Balla Mboup devait écrire ou périr car les flammes de l’inspiration lui brûlaient les entrailles. Tant mieux. Cela nous vaut ce rendu d’une vie fort inspirante.
Le livre, je ne l’ai pas encore lu. Mais il nous est raconté sur place par l’auteur, bien entouré de ses deux complices, le modérateur, Sakura Jean Diagne Syr et l’éditeur Pape Samba Badji.
Je n’avais pas encore assisté à une cérémonie de dédicace où l’auteur installe, dans une rare simplicité, une interactivité animée entre le public et lui. On peut dire qu’il a réussi l’exercice de partage avec une grande intelligence, dans un élan de sincère générosité. Quand je l’ai vu relever la tête et déclarer dans une attitude qui dégainait toute sa dignité : « Je suis griot ! » Je me suis dit à l’ivoirienne : « Petit-là est malin déh ! Il va nous blaguer »
En effet, le jeune homme nous a tous bluffés. Son parcours ‘’sonnant’’ a d’abord été ‘’trébuchant’’. Son enfance et sa prime jeunesse sont parsemées d’embûches. Mais il a toujours su se remettre de ses blessures et se relever de ses échecs. En fait, il nous a montré la voie de la résilience. Son père décédé très tôt, des blocages psychologiques ont eu à perturber quelque peu sa scolarité. Mais le jeune homme s’est vite endurci la peau du crâne. En vérité, son récit nous sert de leçons de vie. Il nous rappelle Hugo écrivant : « Ah ! Quand je vous parle de moi, je vous parle de vous. »
Une autre leçon qu’il nous a donnée avait trait à la fidélité et à la reconnaissance. Il y avait dans la salle ceux qui l’ont vu naître, ceux qui l’ont vu grandir, ses camarades de jeu ou d’école, ses professeurs de collège, ses jeunes sœurs, ses compatriotes résidant au Maroc et même sa collaboratrice qualifiée de « la plus sénégalaise des Marocaines ».
C’était moi l’intrus, en quelque sorte. Nous nous sommes connus sur Facebook autour des nos idées panafricanistes souverainistes mais aussi à travers notre goût commun pour un humour quelque peu caustique mais discret. Pour cela, il m’a fait l’honneur de m’inviter à la cérémonie. Je n’ai pas pris la parole, mais j’ai écouté tout le monde pour faire ce papier que vous êtes en train de lire.
A propos de parole. On ne l’a pas distribuée. Il n’y avait aucune formalité pour la prendre. On l’empruntait à sa guise, pour livrer, en français ou en wolof, les témoignages saisissants que nous avons pu entendre pendant des heures.
Pour le clou de la cérémonie, l’auteur nous a présenté quatre trophées obtenus en 2024
1-Prix Senegalese business service rendu à la communauté sénégalaise
2-Prix supmti pour une intégration réussie
3-Prix Africainlevel UP (Révélation de l’année)
4-Prix Logiter Union Africaine des transports et de la logistique pour service rendu à la sécurité routière en Afrique
Ces différentes distinctions ont été dédiées (dans le désordre) à sa mère, son grand frère qui a parachevé son éducation, ses professeurs de collège et la Mairire de Ndiarème Limamoulaye.
Ce que je retiens de cet auteur à la larme si facile, (Il en écrasait une après chaque témoignage), c’est un garçon intelligent, résilient, ambitieux mais fidèle à ses origines. Expert en sécurité routière, ce journaliste à la base est d’un abord facile et chaleureux, ainsi que d’une touchante humilité.
Je souhaite bon vent au livre en attendant le prochain. On l’a entendu, dans une grande facilité, faire des vers sans en avoir l’air. C’est pourquoi je me permets de penser qu’il va récidiver. Nous attendons le prochain, in sha Allah.
Cher auteur, bienvenue dans le monde du Livre.
Mbegaan Koddu